je ne saurais m’attendrir sur les maux imaginaires d’un homme qui se regarde comme persécuté, lorsque toute la terre est à ses pieds, d’un homme à qui l’on rend peut-être plus qu’il ne mérite. Pour que la perte de la raison puisse inspirer une vive pitié, il faut qu’elle ait été produite par un grand malheur, ou qu’elle soit le résultat d’une idée fixe, généreuse dans son principe.
 François-René de Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe (1850). copier la citation

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Auteur François-René de Chateaubriand
Œuvre Mémoires d'outre-tombe
Thème perte malheur
Date 1850
Langue Français
Référence
Note
Lien web https://fr.wikisource.org/wiki/M%C3%A9moires_d%E2%80%99outre-tombe

Contexte

“c’est joindre le délire de l’orgueil à une dureté, à une stérilité de cœur dont il y a peu d’exemples. J’aime mieux supposer, afin de l’excuser, que Rousseau n’était pas toujours maître de sa tête : mais alors ce maniaque ne me touche point ; je ne saurais m’attendrir sur les maux imaginaires d’un homme qui se regarde comme persécuté, lorsque toute la terre est à ses pieds, d’un homme à qui l’on rend peut-être plus qu’il ne mérite. Pour que la perte de la raison puisse inspirer une vive pitié, il faut qu’elle ait été produite par un grand malheur, ou qu’elle soit le résultat d’une idée fixe, généreuse dans son principe. Qu’un auteur devienne insensé par les vertiges de l’amour-propre ; que toujours en présence de lui-même, ne se perdant jamais de vue, sa vanité finisse par faire une plaie incurable à son cerveau, c’est de toutes les causes de folie celle que je comprends le moins, et à laquelle je puis le moins compatir.” source