nous voilà offensés puisque la nature semble empiéter sur nos droits de propriété de la façon la plus profane. Et nous garons nos oreilles de toute physiologie, nous décrétons à part nous que nous voulons ignorer que l’homme est encore autre chose qu’âme et forme. Pour tous ceux qui aiment, « l’homme sous la peau » est une abomination, une monstruosité, un blasphème envers Dieu et l’amour.
 Friedrich Nietzsche, Le Gai Savoir (1882). copier la citation

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Auteur Friedrich Nietzsche
Œuvre Le Gai Savoir
Thème monstruosité propriété
Date 1882
Langue Français
Référence
Note Traduit par Henri Albert
Lien web https://fr.wikisource.org/wiki/Le_Gai_Savoir/Texte_entier

Contexte

“— Lorsque nous aimons une femme il nous arrive parfois de haïr la nature, en songeant à toutes les rebutantes fonctions naturelles à quoi toute femme est soumise ; volontiers nous penserions à autre chose, mais si, par hasard, notre âme effleure ce sujet elle est prise d’un mouvement d’impatience et jette un regard de mépris sur la nature : — nous voilà offensés puisque la nature semble empiéter sur nos droits de propriété de la façon la plus profane. Et nous garons nos oreilles de toute physiologie, nous décrétons à part nous que nous voulons ignorer que l’homme est encore autre chose qu’âme et forme. Pour tous ceux qui aiment, « l’homme sous la peau » est une abomination, une monstruosité, un blasphème envers Dieu et l’amour. — Eh bien ! ce sentiment de ceux qui aiment, à l’égard de la nature et des fonctions naturelles, était autrefois celui des adorateurs de Dieu et de sa « toute puissance » : dans tout ce que les astronomes, les géologues, les physiologistes, les médecins disent de la nature, ces adorateurs voient un empiètement sur ce qu’ils ont de plus sacré, donc une attaque, — et de plus la preuve de l’imprudence de celui qui attaque !” source