On voit des hommes qui laissent échapper, comme par oubli, l’objet de leurs plus chères espérances. Entraînés par un courant insensible contre lequel ils n’ont pas le courage de lutter, et auquel pourtant ils cèdent à regret, ils abandonnent la foi qu’ils aiment pour suivre le doute qui les conduit au désespoir.
 Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835). copier la citation

Contexte

“Mais il n’en est point de même lorsqu’une croyance religieuse est sourdement minée par des doctrines que j’appellerai négatives, puisqu’en affirmant la fausseté d’une religion elles n’établissent la vérité d’aucune autre. Alors il s’opère de prodigieuses révolutions dans l’esprit humain, sans que l’homme ait l’air d’y aider par ses passions, et pour ainsi dire sans qu’il s’en doute. On voit des hommes qui laissent échapper, comme par oubli, l’objet de leurs plus chères espérances. Entraînés par un courant insensible contre lequel ils n’ont pas le courage de lutter, et auquel pourtant ils cèdent à regret, ils abandonnent la foi qu’ils aiment pour suivre le doute qui les conduit au désespoir. Dans les siècles que nous venons de décrire, on délaisse ses croyances par froideur plutôt que par haine ; on ne les rejette point, elles vous quittent. En cessant de croire la religion vraie, l’incrédule continue à la juger utile.” source