Un homme épuisé de travail, de soucis, de peines, a besoin d’aliments succulents qui lui portent de nouveaux esprits au cerveau ; un enfant qui vient de s’ébattre, & dont le corps croit, a besoin d’une nourriture abondante qui lui fasse beaucoup de chyle. D’ailleurs l’homme fait a déjà son état, son emploi, son domicile ; mais qui est-ce qui peut être sûr de ce que la fortune réserve à l’enfant ?
 Jean-Jacques Rousseau, Émile, ou De l’éducation (1762). copier la citation

Contexte

“Ceux disent qu’il faut accoutumer les enfans aux aliments point ils useront étant grands, ne raisonnent pas bien, ce me semble. Pourquoi leur nourriture doit-elle être la même, tandis que leur manière de vivre est si différente ? Un homme épuisé de travail, de soucis, de peines, a besoin d’aliments succulents qui lui portent de nouveaux esprits au cerveau ; un enfant qui vient de s’ébattre, & dont le corps croit, a besoin d’une nourriture abondante qui lui fasse beaucoup de chyle. D’ailleurs l’homme fait a déjà son état, son emploi, son domicile ; mais qui est-ce qui peut être sûr de ce que la fortune réserve à l’enfant ? En toute chose ne lui donnons point une forme si déterminée, qu’il lui en coûte trop d’en changer au besoin. Ne faisons pas qu’il meure de faim dans d’autres pays, s’il ne traîne partout à sa suite un cuisinier français, ni qu’il dise un jour qu’on ne sait manger qu’en France.” source